Problématique
:
Les échanges de paroles tissent les liens dont tout
individu a besoin pour trouver sa place dans le groupe, la
communauté, la société. Comment les nouvelles modalités de ces
échanges prolongent-elles ou, au contraire, bouleversent-elles notre
façon de penser la construction de soi, les relations humaines, les
interactions avec les autres et avec le monde ?
Écrit/oral : Les échanges de paroles font
intervenir une langue particulière, écrite ou orale. Les codes
langagiers sont à prendre en compte dans leur diversité :
codes spécifiques de l'échange épistolaire, codes de la
conversation courante, codes des échanges numériques. Ces derniers
brouillent les catégories de l'écrit et de l'oral : les
échanges numériques, qui semblent instantanés et éphémères,
laissent pourtant des traces tant il est encore vrai que « les
paroles s'envolent et (que) les écrits restent ».
Dans ces conditions, quels codes apprendre, à
quelles normes se référer pour communiquer ?
Privé/public : Par ailleurs, la
communication est régie a priori par des critères différents selon
le caractère privé ou public de l'échange. Cette distinction
semble cependant remise en cause par les réseaux sociaux qui
rendent la vie privée accessible à des publics apparemment choisis.
Construit-on son identité de la même façon dans un espace protégé
- celui de la famille ou d'un cercle d'amis proches - et dans
un réseau social ouvert ? Peut-il y avoir encore de la
spontanéité dans les échanges ?
Professionnel/amateur : Qui détient une
parole légitime ? Les frontières se brouillent entre la parole
des experts, la parole reconnue, et la parole de tous et de chacun.
Les blogs contribuent à forger les opinions. Ne risque-t-on pas de
perdre la qualité professionnelle de l'appréciation portée sur une
information ?
Lieu de pouvoirs/espace démocratique : Du
fait du brouillage des codes, la conversation sur internet nivelle
les relations hiérarchiques en rendant tout un chacun apparemment
accessible. Chacun peut entrer dans une discussion, connaître la
pensée de l'autre ou progresser dans la sienne grâce aux
interactions entre plusieurs interlocuteurs.
Les nouveaux moyens de communication permettent
aussi de se constituer en lobbys pour influencer une décision,
contourner les médias officiels, pour faire entendre une autre voix,
résister à des pouvoirs autoritaires. Mais ces mêmes moyens
peuvent être le lieu où se renforce l'expression d'un groupe de
pression, qui diffuse des affirmations sans citer ses sources, fausse
les informations, avec une efficacité redoutable. Les nouveaux
moyens de communication aident-ils à mieux exercer la citoyenneté ?
Proximité/distance : Les lieux de
communication traditionnels (la salle de banquet, le café, les
salons, etc.) influent sur l'échange. La relation entre
interlocuteurs est réinterrogée par les nouvelles technologies. En
présence ou à distance (par la lettre, le téléphone, le mél, les
messageries et le contact vidéo), qu'est-ce qui se joue dans ces
formes de dialogue ? Quels changements, quels gains, apportent
les relations virtuelles par rapport aux relations directes en face à
face ?
Continuité/discontinuité : La facilité des
échanges, qui reposent sur des moyens techniques en permanence
disponibles, permet une relation ininterrompue. Or se donner le temps
de la réflexion, prendre de la distance avant de poursuivre et de
revenir à une situation et, dans cette interruption, avoir mûri,
progressé, organisé sa pensée, permet de mieux fonder son
jugement. Cette manière de former ses idées a-t-elle encore un sens
à l'heure des échanges spontanés, permanents, continus ? Le
temps de la réflexion est-il le garant indispensable de la qualité
de l'échange ?
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire