L'objet marchandise
L'objet est le
fruit d'un travail. Le silex taillé par exemple est issu à la fois de la nature
et de l'activité d'un homme. L'objet représente donc l'addition d'une
production naturelle et d'une valeur ajoutée par l'homme. L'objet, comme par
exemple le livre que vous lisez, c'est du travail humain. Il n'a de sens et de
valeur que par l'usage que vous en faites et parce qu'il est le résultat d'une
activité. Mais, dans l'économie de marché, l'objet devient marchandise. Du
coup, sa valeur ne réside plus tout entière dans le travail qui l'a produit ou
dans l'usage que vous en faites. Il devient en quelque sorte indépendant du
travail et de l'usage. Imaginez que le livre que vous lisez soit un exemplaire
de l'édition originale de Candide de Voltaire. Sa valeur n'est plus
celle du travail, elle devient celle du marché, elle augmente en fonction de la
demande et de l'offre. Au lieu de valoir cinq euros comme un livre de poche,
votre livre en vaut soudain dix mille. C'est ce que Marx appelle le fétichisme
de la marchandise. Le fétichisme, au sens religieux, est la croyance que
certains objets ont une puissance surnaturelle, divine. Marx, par analogie,
applique ce terme aux échanges de marchandises dans le système capitaliste. Il
veut dire que ce système confère à l'objet une puissance usurpée, qui n'est
plus celle du travail humain. Dans la marchandise, le travailleur salarié ne se
reconnaît plus, il n'a fait que vendre sa force de travail pour que
l'entreprise produise l'objet, l'objet lui échappe complètement, ce n'est plus
le fruit de sa volonté. C'est pourquoi Marx pense que le travailleur aliène son
travail dans ce système. A la différence de l'artisan, il n'est plus le maître
de son travail. Et l'objet produit par son travail ne lui appartient pas, à
aucun moment. Le fétichisme de la marchandise signifie que le producteur comme
le consommateur voient dans l'objet non pas du travail mais une valeur
abstraite, déterminée par le marché, la somme que l'objet peut coûter dans
telle conjoncture selon la loi du marché qui se déconnecte de la valeur d'usage
et de la valeur travail. Les dix mille euros que valent l'édition originale de Candide
n'ont plus rien à voir avec le travail nécessaire à la fabrication d'un livre
ni même avec l'usage qu'un lecteur peut en faire.
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