Un nouveau suicide, après celui d'Amanda Todd, repose de façon tragique le problème de l'exposition de soi sur Internet et des risques de manipulation.
Les adolescents sont particulièrement vulnérables.
"New danger online for teenagers", un article court et synthétique sur la question, en anglais (pour s'entraîner à la traduction, excellent exercice d'écriture)
Voici l'opinion d'un psy interviewé par une journaliste du Figaro :
INTERVIEW - Selon Michael Stora, psychologue et spécialiste des mondes numériques, certains adolescents ne supportent pas que leurs proches découvrent une autre facette d'eux-mêmes.
LE FIGARO. - Comment certains jeunes internautes peuvent-ils arriver à se suicider?Michael STORA. - Ce sont vraisemblablement des personnes qui devaient déjà vivre dans cette pression sociale. Et à partir du moment où il y a transgression et que des images «interdites» passent de la sphère privée à celle publique, alors la honte et la culpabilité surgissent. Il est insupportable pour l'adolescent de réaliser que son entourage familial et amical puisse découvrir cette facette de lui, même si cela se cantonne à un simple dérapage (note du blog : on appréciera le mot "dérapage" à propos d'une exhibition sexuelle sur Chatroulette). Le suicide est ainsi un acte fou, dicté par l'image non assumée que l'on donne de soi. Et plus la pression sociale est forte, plus le passage à l'acte est fort.
En quoi la sphère virtuelle est-elle un lieu de désinhibition?
Internet est un espace à l'abri du regard où l'on peut s'affranchir d'une pression sociale, de l'interdit en général. Dans notre société qui, je trouve, d'ailleurs, revient à un certain puritanisme, le sexe est ce qu'il y a de plus transgressif. C'est tout le paradoxe que l'on retrouve aux États-Unis, pays le plus puritain et qui pourtant a vu naître la pornographie : on parle beaucoup de sexe, mais il reste tabou et culpabilisant.
Aujourd'hui, les adolescents découvrent donc de plus en plus le sexe via Internet, que cela passe par le visionnage de sites pornographiques ou bien par l'exhibitionnisme sur des chats et des sites comme Chatroulette, où des internautes, qui ne se connaissent pas, dialoguent par webcams. La sphère virtuelle constitue un lieu d'expérimentation sexuelle, un laboratoire de recherche, où l'on s'autorise beaucoup plus de choses que dans la vie dite «réelle». On assiste à un phénomène de désinhibition où les jeunes se sentent à l'abri de certains interdits psychologiques ou sociétaux.
L'internaute peut-il avoir l'illusion d'être protégé par l'écran?
Complètement, et il oublie parfois qu'il y a un autre de l'autre côté. D'autre part, beaucoup de personnes ne cherchent pas à chercher à savoir à qui elles ont affaire. Ces histoires révèlent un problème: les jeunes doivent être attentifs à l'image qu'ils donnent, dans le sens où ils doivent faire attention. Et, dans le même temps, il y a une nécessité de vivre au travers de l'image qu'on donne et donc d'être dans la provocation et la surenchère.
Y a-t-il un profil type de l'agresseur?
Il est extrêmement manipulateur et détecte très rapidement les failles de l'internaute. Les adolescents peuvent par exemple être en position de vulnérabilité par rapport à la sexualité. Ils sont à une période pendant laquelle ils apprivoisent leur corps, et certains peuvent avoir du mal à gérer leurs pulsions. Et dans une situation de manque, leur crédulité peut être très forte. Ils peuvent ainsi se laisser embobiner par des personnes malveillantes.
Par Anne-Laure filhol, Le Figaro
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